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UKRAINE

DESCRIPTION DU PAYS

Source: wikipedia.org

KIev. Source: non identifiée

L’UKRAINE VU D’AILLEURS

L’Ukraine est un État d’Europe orientale, deuxième d’Europe par sa superficie. Bordé par la mer Noire et la mer d’Azov au sud, la Russie au nord-est et à l’est, Biélorussie au nord, Pologne, Slovaquie, Hongrie à l’ouest, Roumanie et Moldavie au sud-ouest. La capitale   et ville la plus peuplée du pays est Kiev.

En 1992, 52 millions d’habitants, lors de l’indépendance face à l’URSS ; puis en 2014 la Russie récupéra la Crimée. En 2022 : 41 millions puis l’armée russe entre dans les régions russophones et russophiles de l’est et  occupe  environ 1/5° du territoire  (Louhansk, Donetsk, Zaporijia et Kherson). Combien d’habitants de nos jours ? Entre 31 et 35   millions ?

« Avant d’être devenue un État indépendant, après la dissolution de l’Union soviétique en 1991, l’Ukraine fut longtemps une zone limitrophe mal délimitée, couverte de steppes et de prairies, et revendiquée par les puissances polonaises et russes, puis turques au fur et à mesure du retrait des populations nomades tatares et mongoles ». Un espace disputé donc, revendiqué par plusieurs puissances étrangères, à l’ouest et au sud (par l’Empire ottoman), sujet à invasions et partitions. Après avoir été partiellement conquise par les Turcs, la partie occidentale fut rattachée à l’empire d’Autriche, à son successeur l’Autriche-Hongrie, puis à la république de Pologne ».

La région vit naître les redoutables Cosaques, C’est durant la domination lituano-polonaise, à partir du XVe siècle, que s’organisèrent les Cosaques, des paysans ruthènes orthodoxes qui refusaient la servitude et l’assimilation aux Polonais catholiques. Le royaume de Pologne les tolérait et les utilisait contre les Tatars, puis, à partir du XVIe siècle, contre les Turcs ottomans, devenus suzerains des Tatars de Crimée.

 L’Ukraine fut indépendante entre 1917 et 1922  et connut un épisode dont le souvenir est cher aux anarchistes de tout poil. Le pays fut  en effet pendant cette courte période le théâtre d’une épopée, l’insurrection   des anarchistes  de la  Makhnovchtchina, du nom de son inspirateur – les anarchistes n’ont pas de chef –  Ivanovitch MIKNIENKO – dit Nestor Makhno – c’est une armée paysanne,  révolutionnaire,  avec à  son apogée près de 100 000 combattants,  communistes, libertaires, anarchistes, opposés  aux armées blanches et rouges. L’armée noire tenta de réaliser son utopie, la collectivisation des terres et la démocratie directe et décentralisée. En 1921, la révolte   fut finalement, écrasée par l’Armée Rouge. Makhno-le-vaincu finit pauvre et boiteux au pavillon des tuberculeux de l’hôpital parisien Tenon en 1934, mourut en 1934, enterré au Père-Lachaise. Division 87.

Source: https://www.appl-lachaise.net/

            L’Ukraine fut surtout le terrain du grand bassin minier et métallurgique le Donbass, il comprend deux oblasts :  Donetsk et  Louhansk, déjà exploité depuis la fin du XIXe siècle, objet d’une  importante mise en valeur. Quand Staline déclenche sa révolution industrielle vers la fin des années 1920, l’Ukraine devient l’une des sources indispensables du financement de l’URSS. L’industrialisation s’accompagna de la construction de la plus grande centrale hydro-électrique d’Europe à l’époque – sur le Dniepr -, qui contribua à l’électrification de la République.

Mais Staline veillait au grain, réprimant le moindre signe d’un réveil nationaliste ukrainien.  Et des oblasts russes, comme celui de Kharkiv,  furent  intégrées à la RSS d’Ukraine pour  y renforcer le poids des russophones. Moscou cherchait à rattacher fermement l’Ukraine et voulait en faire une forteresse de l’URSS, selon les mots de Staline.

               Entre 1931 et 1933, en Ukraine comme dans toute la fédération la   famine et l’intensification de la « dékoulakisation » ravagèrent le pays  alors que cette région était la plus fertile de toute l’URSS. Entre 2,6 et 5 millions de personnes en meurent.

               1937-1939 : durant les purges staliniennes des Ukrainiens suspects de nationalisme dit « bourgeois «   sont exécutés ou déportés vers des camps de travail soviétiques.

                En septembre – octobre 1939, après le partage de la Pologne entre l’Allemagne nazie et l’URSS stalinienne, les régions polonaises à forte minorité ukrainienne (comme la Galicie et Lwow, aujourd’hui Lviv) furent annexées par l’URSS et incorporées au sein de l’Ukraine occidentale, conformément aux protocoles secrets du pacte germano-soviétique.

              Entre 1941 et 1944, pendant la Seconde Guerre mondiale, dans la République socialiste soviétique d’Ukraine, le funeste projet nazi d’extermination avançait, un million et demi de juifs ukrainiens moururent victimes de persécutions, de déportations.

               En 1944, l’Armée rouge libéra la plus grande partie du pays et en 1945, l’Ukraine devint l’un des membres fondateurs de l’ONU, et y obtint de par son rôle dans la victoire sur le nazisme – comme la Biélorussie -, une  voix à l’Assemblée Générale, distincte de celle de l’URSS.  Après 1945 l’Ukraine partagea avec les 14 autres  républiques fédérées le destin de l’URSS.

   En 1986 suite à une série d’erreurs, l’explosion du réacteur  n° 4 conduisit à l’explosion de la  centrale nucléaire  située  dans la ville de Pripiat  – ( à 18 km au nord-ouest de Tchernobyl, 16 km de la frontière entre l’Ukraine et la Biélorussie, et environ 110 km au nord de Kiev) –  L’accident  inquiéta pour ses conséquences  humaines  durables,( 24 000 ans  pour la radioactivité ?), – des polémiques subsistent sur le nombre des « liquidateurs » irradiés-. Jusqu’en 1986, les travailleurs habitaient la ville de Pripiat construite en même temps que la centrale, depuis l’évacuation, ils habitent à Slavutych à 45 km à l’est de la centrale. Finalement une structure en forme d’arche a été construite entre 2007 et  2018, elle  recouvre désormais le réacteur n°4 pour lequel les conditions de démantèlement ne sont toujours pas précisées. Pesant plus de 30 000 tonnes, cette arche mesure près de 110 m de haut et 256 m de long. Elle est censée avoir une durée de vie d’au moins 100 ans.

Tchernobyl. Source: Wikipedia.org

     En 1991, le XX° siècle d’après la Seconde Guerre Mondiale bascula, un séisme politique ébranla les équilibres géostratégiques nés en 1947 : presque un demi-siècle après sa naissance, la Guerre Froide prit fin : l’immense empire soviétique se disloqua.  George Bush annonça que les EU, l’empire américain dont  l’URSS   était le meilleur ennemi, l’avait emporté. L’Ukraine comme les 14 autres ex- républiques devint indépendante.  Et en 1994 par le Mémorandum de Budapest sur les garanties de sécurité, le pays abandonna son arsenal nucléaire en échange de la garantie par les États-Unis, le Royaume-Uni et la Russie son intégrité territoriale.

L’Ukraine comme les 14 autres ex- républiques devint indépendante.  Et en 1994 par le Mémorandum de Budapest sur les garanties de sécurité.

      En décembre 2004  la « révolution orange » reflétait l’opposition entre deux parties de la société, c’était le legs de l’histoire, celui du clivage séculaire entre le nord-ouest, orthodoxe mais d’influence polonaise et lituanienne, c’est-à-dire occidentale, et le sud-est, soumis aux Tatars et aux Ottomans, puis conquis et colonisé par l’Empire russe. Il se retrouve jusqu’à aujourd’hui dans la structure politique du pays : le nord-ouest vote plutôt pour les pro-européens et se méfie de l’influence russe, tandis que le sud-est souvent russophone vote plutôt pour les pro-russes, se méfie de l’influence occidentale (souvent assimilée au fascisme depuis la Seconde Guerre Mondiale) et peut même se soulever contre le pouvoir de Kiev lorsque ce dernier se rapproche de l’Ouest. Très rapidement, une crise éclata entre les parties.

La loi de 2012 sur les langues régionales   qui  permettait d’utiliser le russe comme seconde langue officielle dans certaines régions fut abrogée, la Rada (le Parlement) retira ainsi le statut de langue officielle au russe (comme au roumain, au hongrois et au tatar criméen) dans 13 des 25 régions ukrainiennes (essentiellement réparties au Sud et à l’Est du pays).  L’émotion dans la population russophone d’Ukraine fut  importante, car   près de 30% de la population ukrainienne parle le russe ( de 58 à 91 % dans les oblasts de Crimée, de Dnipropetrovsk, de Donetsk, de Mykolaïv, de Louhansk, de Kharkiv, d’Odessa et de Zaporijia).  Le conflit dans la région du Donbass  se transforma en conflit de « basse intensité », depuis le début des combats près d’un million et demi de personnes ont été déplacées. Une guerre civile, dite guerre du Donbass, une guerre hybride commença, opposant, d’avril 2014 à février 2022, le gouvernement ukrainien à des séparatistes pro-russes majoritairement russophones et à la Russie, dans l’est du l’Ukraine, qui entraîna plus de dix mille morts et le déplacement de près d’un million et demi de personnes.

           Elle avait débuté en février 2014 dans le contexte des manifestations de l’Euromaïdan dénonçant la corruption du pouvoir en place. Depuis 2014/ 2022 l’Ukraine est en guerre – comme dans d’autres Etats   ailleurs dans le monde, guerres ouvertes ou larvées comme en Afrique, en Asie, et au Moyen-Orient, entre voisins, ou guerres civiles, intérieures-. Ici le conflit, larvé depuis 2014 se déroule dans les régions russophiles, l’est du territoire.

        En 2014 la « mère-patrie » la Russie récupéra sans coup férir la Crimée, où la population était très largement russophone et russophile. Brejnev, le principal dirigeant de l’URSS pendant 18 ans entre 1964 et 1982, était d’origine ukrainienne. La péninsule, partie de la Russie depuis Catherine II, avait été offerte d’un trait de plume par Khrouchtchev à l’Ukraine en 1954.  La péninsule proclama son indépendance, et après un référendum fut rattachée à la fédération de Russie.  Référendum et rattachement condamnés par l’Ukraine et une large part de la communauté internationale. La péninsule est désormais, depuis 2018 reliée à la Russie par le pont de Kertch (18 km de long), construit par la Russie. Il fut saboté en 2023, par qui ? A qui profite le crime ?

Pour ce qui nous intéresse, cette petite région la Crimée abrite un joyau mondial de la viticulture, la cave de Massandra.  Elle avait été protégée pendant la Seconde Guerre Mondiale. Cf Article sur la cave.

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       En février 2022 les troupes russes entrèrent en Ukraine depuis les territoires séparatistes. Le président russe V.Poutine reconnut l’indépendance des républiques populaires autoproclamées de Donetsk et de Lougansk et ordonna à ses troupes de se rendre dans ces régions dans le cadre de ce que le Kremlin qualifie de « mission de maintien de la paix »  qui devint  un conflit ouvert, avec bombardements sur plusieurs villes ukrainiennes, dont Kiev.

Lors du Conseil Européen en juin 2022, les chefs d’État et de gouvernement ont accordé le statut de candidat à l’Union Européenne à l’Ukraine. En septembre 2022, le président de la fédération de Russie revendiqua l’annexion, non reconnue par l’ONU, des régions ukrainiennes de Louhansk, de Donetsk, de Kherson et de Zaporijjia au cours d’une cérémonie au Kremlin de Moscou. Lors du sommet de l’OTAN de 2023, l’Alliance a déclaré que « l’avenir de l’Ukraine est dans l’OTAN » sans pour autant donner de calendrier. Le conflit se poursuit.

Sont nés  en Ukraine : Malevitch qui sonne en 1918  l’entrée de l’art abstrait et la mort ( provisoire ?) de l’art figuratif  avec  son Carré blanc sur fond blanc ; Prokofiev le compositeur  dont les enfants connaissaient autrefois Pierre et le loup ;   des écrivains majeurs  comme Boulgakov, Gogol,  Joseph Conrad ( Au cœur des ténèbres, Lord Jim….), et puis un des plus grands patrons de medias au XX° siècle R. Maxwell,  et puis Otto Preminger réalisateur de nombreux films au succès considérable ;  Trotski ;  Leonid Pliouchtch  mathématicien  et célèbre dissident soviétique ; Makhno ;  et puis Leopold Sacher-Masoch dont le nom fut donné   à celui qui trouve du plaisir à souffrir (opposé à sadisme). Et aussi Bubka qui le premier dépassa six mètres au saut à la perche, Davidoff l’ami des fumeurs de cigares….


Carré blanc sur fond blanc de Malevitch. Source: Par Kasimir Malevitch — MoMA, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/

PRÉAMBULE VITICOLE

La Fédération de Russie, en annexant la Crimée en 2014, à amputer la viticulture d’Ukraine de plus de 50%. C’est en Crimée que certains des vins doux les plus réputés au monde, autrefois appelé Tokai, Porto, Madère Kagor et les muscats, blancs, roses et rouges ont été élaborés depuis de la période tzariste jusqu’à nos jours. Depuis l’annexion, la viticulture ukrainienne tente de se réorganiser pour produire des vins secs plus en phase avec les goûts occidentaux dans les quatre régions viticoles de L’Ukraine « oblasts » dans le sud : Mykolaïv, Kherson, Dnipropetrovsk et Odessa, cette dernière représentant près de 50 % de la superficie totale de l’Ukraine amputé de la Crimée. La guerre entre la Fédération de Russie et L’Ukraine dont l’enjeu principal semble entre le sud de l’Ukraine va sérieusement mettre à mal la tentative de renouveau de la viticulture ukrainienne. Cette section du site appelé Ukraine, décrit en fait la viticulture et l’élaboration du vin de Crimée avant l’annexion de cette dernière. La Crimée, n’étant pas un pays, elle figure donc sur ce site comme une région viticole de l’Ukraine. Nous passerons en revue succinctement les autres régions viticoles d’Ukraine car aucun vin d’intérêt n’est à notre connaissance produit dans ces régions.

PRÉAMBULE POLITIQUE

Vu la situation actuelle très compliquée de la Crimée, dont le statut est controversé, russe ou ukrainienne, deux points de vue antagonistes s’affrontent. Pour les Russes, il s’agit d’une réintégration de la péninsule, qui est russe depuis le règne de Catherine II en 1783 puis soviétique

(1918-1991). La population de la péninsule est très majoritairement russe et russophone, a exprimé sa volonté lors d’un référendum.

Pour les autres, l’Ukraine, ancienne république soviétique comprenait la Crimée depuis 1954, celle-ci donc lui appartient. Elle a l’appui y compris militaire dans la guerre actuelle des pays occidentaux.

Pas de compromis possible ? L’Ukraine dès sa « révolution » a marqué sa distance vis-à-vis de la Russie, a pris clairement une position anti-russe, réclamant son intégration à l’Union Européenne et à l’OTAN. Ce dernier détail provoque l’inquiétude des Russes, qui en étaient restés aux fragiles accords de Kiev, qui excluaient cette disposition. Tant pis pour les provinces de l’est de l’Ukraine où la langue russe était désormais interdite, et l’eau potable en provenance du Dniepr coupée. Où les armes parlent depuis 2014.

Le clivage entre les deux points de vue est très clair.

PRÉSENTATION DE LA CRIMÉE VITICOLE

La superficie totale de la péninsule de Crimée est de 27 000 km² (= Languedoc-Roussillon). Les principales zones de culture du raisin sont concentrées dans 12 zones principales, qui comprennent 3 régions viticoles principales, la steppe côtière occidentale, les contreforts, la côte sud, la steppe orientale. La superficie totale des vignobles est d’environ 31 500 hectares, dont 28 000 ha sont utilisés pour la culture de cépages de cuve et de table. Les 3 500 hectares restants sont destinés aux mélanges variétaux et aux cépages méconnus.

Les cépages de cuve représentent 67 % et les cépages de table 33 %. 68 cépages et 38 cépages de table sont cultivés dans la péninsule de Crimée. Le cépage le plus planté est le Rkatsiteli (30,3 % de la superficie du vignoble).

Les styles historiques des vins des vignobles situés le long de la côte au sud de la Crimée comprennent en particulier les vins doux mutés et, lors de leur introduction, ils s’appelaient Porto, Madère, Sherry et Tokay et Kagor, un vin de dessert rouge doux qui a été nommé ainsi d’après la région française de Cahors. Les muscats, peut-être les plus célèbres de tous, sont blancs, roses et noirs.

Après l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, Novy Svit a été l’une des premières entreprises publiques à être privatisée. Elle fut achetée par Yury Valentinovitch Kovalchuk, en 2017 pour 1,5 million de roubles (26,4 millions de dollars à l’époque). Il était le directeur et actionnaire principal de Rossiya Bank et serait le banquier personnel de Poutine.

Le père de l’industrie viticole de Crimée est incontestablement Lev Sergeyevitch Golitsyne. Il   fonda le désormais célèbre Domaine Massandra en 1894, où il créa une fabuleuse collection de vins du monde entier, certains déjà en Russie mais à 90% importés par ses soins.

Avant l’annexion (certains parlent de réintégration) de la Crimée par la Russie, les vins de la Crimée représentaient environ 55 % de la production ukrainienne. « Avant l’annexion, la cave vendait 55 % de la production aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Pologne, en Europe et en Russie ». Selon les statistiques ukrainiennes de 2013, il y a 200 000 Criméens impliqués dans les entreprises viticoles, soit près de 10 % de la population.

Amputée de sa région phare, l’Ukraine possède cependant trois régions viticoles La Bessarabie, la Transcarpatie (Zakarpattya) et Odessa qui se sont résolument tournées vers l’élaboration de vins secs plus en phase avec les goûts occidentaux. Mais la guerre actuelle rebat les cartes pour les régions du sud, La Bessarabie et Odessa.

Incroyable. Les importations de vin de l’Ukraine augmentent à nouveau et ont presque atteint les niveaux d’avant-guerre.

HISTOIRE

Des preuves archéologiques indiquent que les raisins étaient connus des tribus locales de la Crimée montagneuse bien avant l’arrivée des Grecs au Xe siècle avant JC.

L’histoire de la production de vin dans les régions du sud de l’actuel Ukraine remonte à plus de 2 500 ans. Cela est attesté par les découvertes archéologiques de pressoirs à vin et d’amphores. La viticulture a probablement été introduite sur la côte sud par des colons grecs et ils fondèrent Chernosèse, l’une des merveilles de la Crimée près de l’actuel Sébastopol. Bien que l’influence grecque soit évidente dans la région, il possible que la vinification ait existé avant l’arrivée des Grecs, s’étant propagée depuis la Mésopotamie.

De nombreux territoires composant l’Empire russe ont eu une longue histoire viticole comme c’est le cas de la Bessarabie, de la Crimée et de la Transcarpatie et la Géorgie et cette histoire viticole pendant plusieurs millénaires a fortement influencé le « processus de civilisation » et faisait partie de la politique et de la culture russe depuis des lustres.

Peu à peu, le sud de l’Ukraine, et en particulier, la Crimée est intégrée au monde grec. La péninsule restera sous cette influence durant dix-sept siècles.

De nombreux cépages grecs, anciens, survivent en Crimée, tels que limnio, athiri et d’anciennes souches de muscat. Si le nord de la péninsule fut longtemps en proie à des conflits successifs, le sud où se concentre la viticulture, était passée sous le contrôle des Génois et des Byzantins qui  succomberont sous les coups de l’Empire Ottoman  en 1475.  Le khanat de Crimée (l’État gouverné par les Tatars) se plaça sous la protection de l’Empire ottoman, payant pour cela un lourd tribut, devenant progressivement un État allié, vassal et musulman qui perdurera jusqu’en 1783. Mais le sud de la péninsule reste sous le contrôle de colonies génoises et du reste de l’Empire byzantin déchu.   La production de vin était interdite pendant la période ottomane. Mais cette restriction fut compensée dans une certaine mesure par une augmentation de la production des raisins de table qui rapportait des revenus au colonisateurs ottomans.

La Crimée en 1845. Source: wikipedia.org

Avec la disparition de la vassalité de la région en 1774, la viticulture et la production de vin connurent un regain d’intérêt et le prince Potemkine prit des mesures pour planter de vignes presque toute la zone des contreforts, et la création d’une École nationale de vinification de Crimée fut reconnue d’utilité publique. Ces dispositions furent approuvées par l’empereur Paul Ier le 13 février 1798. Le développement de la viticulture en Crimée allait amener la fondation en 1812 près de Yalta du « Jardin Botanique Nititsky » et en 1828, l’Institut de Magarach fut créé  dans le jardin botanique pour dispenser des cours de viticulture et de vinification. Le domaine de Massandra sur une superficie de 18 hectares fut créé à cette époque sur la côte de Crimée, par le comte Michael Vorontsov.  En 1889, les légataires du comte vendirent Massandra au Département Impérial des propriétés (« l’Imperial Land Department ») qui gérait tous les domaines des Tsars de Russie. Au début du XXe siècle, il détenait 266 hectares de vignes en Crimée.

Jardin botanique de Nititsky. Source: wikipedia.org

Au cours du XIXe siècle, la Crimée devint l’une des régions viticoles dynamiques. Des viticulteurs de toute l’Europe expérimentèrent   en Crimée avec une vaste gamme de cépages qu’ils essayèrent d’adapter aux conditions locales. Cela fut facilité par une gamme croissante d’études scientifiques sur la qualité des sols, le croisement des plantes et la météorologie.

Pour de nombreux connaisseurs, les résultats prometteurs montrèrent que l’Empire russe pouvait rivaliser avec les célèbres régions viticoles d’Europe occidentale. Mikhail Ballas, Bessarabien noble d’origine grecque, était l’un des critiques de vin les plus célèbres de l’époque. Il est l’auteur d’un ouvrage exhaustif en six volumes sur la vinification en Russie, publié entre 1895 et 1903. S’il apprécie la qualité du vin de Crimée, il critique à plusieurs reprises le goût non raffiné du public russe, qui préfère les boissons frelatées à forte teneur en alcool à vendues à un prix bon marché, étiquetées à tort comme des vins de qualité. Les producteurs paysans, quant à eux, privilégient le vin comme aliment de base sans prétention, à consommer au quotidien plutôt que comme révélateur d’un goût, d’une distinction, et d’une culture noble. Alors que des gens comme Ballas liaient la qualité d’un vin au cépage respectif utilisé, l’idée de « terroir »  résultant d’une combinaison magique  du sol, du climat, de la vigne et de la vinification a également pris forme à l’époque – ne serait-ce que pour  identifier les  facteurs négatifs qui pèsent sur le goût.

La diffusion des cépages européens et le déclin des cépages indigènes qui en résulta avaient rendu la viticulture très vulnérable. Par conséquent, l’irruption du phylloxera porta un coup dur dans les années 1880 et 1890 à l’industrie viticole. En guise de contre-mesure, les importations de plantes furent strictement contrôlées et une loi sur le traitement du phylloxéra fut adoptée en 1885. Certains scientifiques de tendance naturaliste comme le président de la Commission « Bessarabian Phylloxera » Aleksandre Kovalevskii ont même interprété la pandémie   comme une lutte darwinienne pour l’existence des cépages entre eux. Ce n’est qu’en 1895 que l’administration russe passa de l’utilisation radicale des pesticides à la pratique éprouvée du greffage de vignes françaises sur des porte-greffes américains. L’une de leurs figures de proue de la défense du « vrai » vin   était Lev Golytsine, prince et avocat.

Lev Golytsine. Wikiepedia.org

Il commença des expérimentations intensives avec plus de 600 variétés de raisins près de Novy Svet en Crimée en 1878 et étudia le comportement des cépages dans les conditions côtières de la mer Noire. Il opta finalement pour les cépages français de pinot franc, pinot gris, aligoté et chardonnay. Il fut nommé en 1891 maître de chai de « l’Imperial Land Department » pour la Crimée et le Caucase. Il avait en charge les célèbres domaines de la couronne situés au sud comme Abrau-Diurso et Massandra. La première production expérimentale de vin mousseux de Golitsyn utilisant la méthode champenoise fut élaborée à Novy Svet en 1892.

Mais, la viticulture russe fut influencée par les nouvelles méthodes scientifiques occidentales plutôt que de s’enraciner dans les coutumes locales. Cela a facilité la standardisation et l’augmentation de la production de vins moins chers et plus accessibles. L’introduction d’un monopole d’État sur les ventes d’alcool en 1894 qui devait résoudre la fraudefut un échec. Non seulement un groupe relativement restreint de marchands contrôlait désormais le commerce du vin, mais ils prenaient également la liberté de frelater les vins en fonction des goûts présumés de leurs clients – au grand désarroi des vignerons. De 1894 à 1897, Goliytzin il supervisa la construction de la célèbre cave de Massandra. 

Source: wikipedia.org

En 1896, il servit ses vins au sacre du Tsar Nicolas et il devint célèbre pour ses vins qui lui valurent une reconnaissance mondiale à l’Exposition Universelle à Paris en 1900. À la fin de son contrat, Goliytzin continua ses expériences de vinification dans un style classique   au domaine Novy Svet (Nouveau Monde) sur la côte est de la Crimée pour obtenir des vins distinctifs et de terroir.

Mais le dynamisme de la viticulture et de la vinification s’étendait bien au-delà de la Crimée et en 1905, le Centre Scientifique National «V.Ye. Institut de viticulture et de vinification de Tairov» fut fondé à Odessa. Le fondateur du centre était un éminent expert en viticulture et vinification – Vasil Egorovich Tairov.

En 1912, Golitsyne fit donation d’une partie du domaine de Novy Svet (Nouveau Monde) et de vins rares de sa collection personnelle à l’Empereur Nicolas II et de 1920 à 1921, tous les domaines de « l’Imperial Land Department » furent amalgamés et les meilleurs vins transférés au domaine de Massandra.

La cave de Massandra et l’Institut de Magaratch représentent une philosophie du vin en totale contradiction avec la production massifiée de vins, souvent demi-doux, destinés au marché russe et aux pays satellites. Massandra s’est spécialisée dans la production des vins liquoreux mutés dont les meilleurs sont à base de muscat fortifiés.

L’Institut de Magarach. Source:http://wikimapia.org/912331/Magarach-Wine-Institute

En 1918, après la victoire des Bolcheviks dans la guerre civile russe, la Russie devient la République socialiste fédérative soviétique de Russie (RSFSR) tandis que la Crimée, revendiquée par la République populaire d’Ukraine, est aux mains des armées blanches et de leurs alliés franco-britanniques. Quatre années plus tard (1922), la Crimée est intégrée comme République socialiste soviétique autonome de Crimée (RSSA de Crimée, partie de la Russie) dans la toute nouvelle l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) de structure fédérale, comprenant à l’origine quatre Républiques : Russie (Asie centrale incluse), Ukraine, Biélorussie et Transcaucasie (Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan ensemble).

Presque 70 ans après, en 1985, le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev engagea la lutte contre l’alcoolisme, et la répression de la production et de la consommation d’alcool, l’Ukraine, le plus important fournisseur en vin de la Russie, perdit alors plus de la moitié de ses vignobles.

La Crimée devint une région d’une Ukraine indépendante après l’effondrement de l’Union soviétique le 26 décembre 1991.

Étiquette de vin « Docteur noir » de la RSS d’Ukraine (Union soviétique), années 1970. Source: Source: American Association of Wine Economists AAWE

En 2014, la Crimée a été annexée (ou réintégrée selon les points de vue) à la Fédération de Russie. Cela s’est produit au lendemain de la « révolution » ukrainienne de 2014 contre le président Ianoukovitch, qui recherchait des liens plus étroits avec la Russie. Un référendum ultérieur controversé eut lieu en Crimée mais une écrasante majorité s’affirma pour rejoindre la Fédération de Russie.  En effet, la Crimée compte une importante population de Russes de souche, russophones, qui pensent que leur patrie est la Russie et peut-être sincèrement que la vie était meilleure du temps de l’URSS.

Bien que cela ne se compare pas, disons, à la perte de l’accès aux précieuses zones d’exploration pétrolière et gazière de la mer Noire, la perte de la cave de Massandra porte un coup dur à la minuscule industrie viticole ukrainienne, qui ces dernières années avaient recommencé à croître après les années Gorbatchev.

Aujourd’hui, dans la production, qu’elle vienne de Massandra ou d’autres domaines, aucun vin ne passerait la sélection d’un marchand de vin des pays occidentaux. Seuls les liquoreux de Massandra sont de classe mondiale. Mais la production de la cave de Massandra se serait même détériorée depuis l’annexion de la Crimée par la Fédération de Russie.

CLIMAT ET SOLS

L’Ukraine a un climat principalement tempéré, à l’exception de la côte sud de la Crimée qui a un climat méditerranéen subtropical. Le pays bénéficie d’un ensoleillement suffisant et de précipitations toute l’année, fortement concentrées pendant les mois d’été (mai à août). Les précipitations sont très variées selon la région du pays et les modèles de variations saisonnières.

L’Ukraine a une température moyenne annuelle de 7-9°C. Les températures estivales moyennes (mai à août) varient de moins de 18°C à 22°C. Les températures hivernales moyennes (décembre à mars) varient de -4,8°С à 2°C. Les précipitations tombent principalement de l’été à l’automne, juin et juillet ayant généralement les précipitations les plus élevées (67 mm).

La côte sud de l’Ukraine, en particulier la Crimée, a été reconnue dans la littérature biogéographique comme un territoire végétal subméditerranéen. Cette reconnaissance découle de la présence de taxons végétaux méditerranéens malgré sa latitude relativement élevée (entre 43° 23’ 11” et 46° 10’ 26” N) et son éloignement géographique du biome méditerranéen. L’évolution des paysages subméditerranéens du sud de la Crimée implique une série de processus physiques et culturels qui, au cours de plusieurs millénaires de l’Holocène moyen et tardif, ont interagi pour conférer à cette région un caractère méditerranéen. Cette interaction à l’échelle millénaire est appelée la méditerranéenisation de la Crimée.

Le climat de la Crimée est influencé par sa situation géographique, son relief et les influences de la mer Noire. La côte de Crimée est protégée des masses d’air froid venant du nord et, par conséquent, connaît des hivers plus doux. Les influences maritimes de la mer Noire sont limitées aux zones côtières ; à l’intérieur de la péninsule l’influence maritime est faible et ne joue pas un rôle important. Étant donné qu’un système anticyclonique est situé au nord de la Crimée en été comme en hiver, les vents viennent principalement du nord et du nord-est toute l’année. En hiver, ces vents apportent de l’air continental froid et sec, tandis qu’en été, ils apportent un temps sec et chaud. Les vents du nord-ouest apportent de l’air chaud et humide de l’océan Atlantique, provoquant des précipitations au printemps et en été. De plus, les vents du sud-ouest apportent de l’air très chaud et humide des latitudes subtropicales de l’océan Atlantique et de la mer Méditerranée et provoquent des précipitations en automne et en hiver.

la majeure partie de la Crimée (88,5%) reçoit 300 à 500 millimètres (11,8 à 19,7 po) de précipitations par an.[94] Les plaines reçoivent généralement 300 à 400 millimètres (11,8 à 15,7 pouces) de précipitations par an, augmentant à 560 millimètres (22,0 pouces) sur la côte sud au niveau de la mer. Les températures annuelles moyennes varient de 10 ° C (50,0 ° F) dans l’extrême nord ( Armiansk ) à 13 ° C (55,4 ° F) dans l’extrême sud ( Yalta ).

Climat actuel

Climat futur

SOLS

Du nord-ouest au sud-est, les sols de l’Ukraine peuvent être divisés en trois grandes zones: une zone de sols sableux podzolisés ; une ceinture centrale constituée de chernozems ukrainiens noirs extrêmement fertiles; et une zone de sols châtaigniers et salinisés.

Les sols podzolisés occupent environ un cinquième de la superficie du pays, principalement dans le nord et le nord-ouest. Ces sols ont été formés par l’extension des forêts postglaciaires dans les régions de steppe herbeuse ;

Les chernozems du centre de l’Ukraine, parmi les sols les plus fertiles du monde, occupent environ les deux tiers de la superficie du pays.

La plus petite proportion de la couverture du sol est constituée des sols de châtaignier des régions du sud et de l’est. Ils deviennent de plus en plus salinisés vers le sud à l’approche de la mer Noire.

Source: Reserchegate.net

RÉGIONS VITICOLES

Il existe trois zones principales de viticulture dans cette région – les zones de steppe, la sous-montagne méridionale (Foothills) et les zones côtières de la mer Noire (South Coast). Pour en savoir plus sur les régions viticoles de Crimée, cliquez sur le lien suivant: UKRAINE: RÉGIONS VITICOLES

CÉPAGES

68 cépages et 38 cépages de table sont cultivés sur la péninsule de Crimée. Les cépages de cuve représentent 67 % et les cépages de table 33 % sont cultivés dans la région. On recense 27 cépages de cuve autochtones en Crimée. Le cépage de cuve les plus planté est le Rkatsiteli (30,3 % de la superficie du vignoble).Pour en savoir plus sur les cépages de Crimée, cliquez sur le lien suivant: CÉPAGES UKRAINE

LÉGISLATION ET RÈGLEMENTATION

Depuis 2014, la Crimée est sous contrôle russe. La législation qui gouverne aujourd’hui la viticulture et l’élaboration du vin  est la Loi fédérale du 27 décembre (2019 N 468-FZ). Pour consulter l’historique et le détail de la réglementation, cliquez sur le lien suivant: LÉGISLATION ET RÉGLEMENTATION UKRAINE

Ukraine’s Fine Wine Industry Endures and Grows in Wartime. Kristen Bieler Mar 6, 2024